mardi 18 octobre 2016

Un an déjà: parcours d'un préma

Salut mes beauties, j’espère que vous allez bien.

Je vous retrouve aujourd’hui pour discuter d’un sujet qui me tient particulièrement à cœur : les bébés prématurés.

Ma fille vient à peine d’avoir une année et c’est le temps qu’il m’aura fallu pour commencer tout gentillement à digérer un peu ce qui s’est passé et à voir mon enfant comme un enfant "normal" (ce n’est pas encore gagné mais je me soigne). Je précise que cet article risque d’être assez long. Je m’en excuse mais je ne souhaite pas passer à côté de ce que j’ai envie de dire simplement pour faire plus court.

Chaque année, dans le monde, près de 15 millions de bébés naissent prématurés, soit 1 sur 10 environ. Mais ça veut dire quoi prématuré ? Eh bien on appelle « bébé prématuré », tout bébé étant né vivant avant 37 semaines d’aménorrhées (une grossesse dure 40 semaines d’aménorrhées). Il y a plusieurs types de prématurés :

  • Les prématurés extrêmes : bébés nés avant 28 semaines
  • Les grands prématurés : bébés nés entre 28 et 32 semaines
  • Les prématurés moyens (ou tardifs) : bébés nés entre 32 et 37 semaines


Je pourrai vous parler de chiffre encore longtemps mais je ne pense pas que ce soit ça l’important. Le côté sentimental et humain l’est bien plus.

Quand notre bébé naît en avance, en tant que maman, on commence par ressentir de la culpabilité. On se dit que c’est de notre faute et qu’il était de notre devoir de protéger ce bébé dans notre ventre et que nous avons failli à notre responsabilité. Malgré tout ce que l’entourage et le personnel médical peuvent vous dire, c’est une pensée qui est très difficile à éliminer.

À l'accouchement, on n’a même pas le temps de voir notre enfant. Il est emmené tout de suite pour des soins, pour être réanimé ou que sais-je. La séparation est une déchirure tant pour la mère que pour l’enfant.

Puis, de longues heures après la naissance, on voit enfin notre bébé, ce tout petit être dans un incubateur, un grand caisson vitré dans lequel il y a 4 portes par lesquelles on peut passer ses bras. Il faut se désinfecter les mains un million de fois, on a peur de déranger, peur de débrancher un fils, peur d’arracher la perfusion ou la sonde qui relie notre minuscule bébé à sa seule source de nourriture. Bref, tout est compliqué. On n’ose pas. On est paralysé.

Quand bébé est dans notre ventre, on a une idée toute faite de ce à quoi il ressemblera. Ce n’est pas pour rien si une grossesse dure 9 mois. C’est le temps nécessaire pour que le cerveau accepte et comprenne ce qui va se passer, pour que les parents se préparent à leurs rôles de parents et qu'ils intègrent cette nouvelle fonction, surtout si c'est un premier bébé. Quand une grossesse s’arrête brutalement, les parents – et la mère à plus forte raison – n’ont pas encore fait le cheminement psychique nécessaire. Dans leurs têtes, ils ne sont pas parents. Certains même, rejettent l’enfant et s’en culpabilisent d’autant plus qu’ils n’arrivent pas à ressentir d’amour pour ce bébé qui ne ressemble absolument pas à celui qu’ils avaient imaginé. C’est un sentiment très difficile à accepter et à supporter.

En voyant ma petite fille d’un kilo dans cette couveuse je n’osais pas la toucher au départ. Pourtant, le personnel soignant nous y encourage vivement car le bébé a besoin du contact de ses parents pour se développer et évoluer favorablement (il est d’ailleurs prouvé scientifiquement que plus les parents sont présents pour le bébé, mieux il se porte). Je ne savais pas vraiment en quoi je pouvais être utile puisque je n’arrivais rien à faire de ce si petit chou. J’avais peur de déranger le travail des infirmiers, peur de toucher à quelque chose, de dérégler une machine, peur de faire du mal à mon enfant… Je me sentais nulle, inutile, dangereuse et pire encore, responsable de cette situation. Elle était là par ma faute.

Au bout de quelques jours, une jeune infirmière qui s’appelle Daniela et que je remercie infiniment m’a dit « vous savez Madame, c’est votre bébé, pas le nôtre. Vous ne pouvez pas lui faire de mal. » Prise de conscience… C’est mon enfant. Elle a besoin de moi. Et depuis ce jour, j’ai pu m’occuper de ma fille. Avec quelques difficultés dues à son petit poids, à tous les fils auxquels elle était attachée et à la couveuse mais j’ai pris mon courage à deux mains et je me suis lancée. Mais la peur était toujours là. Va-t-elle vivre ? Ai-je raison de m'attacher à ce petit être qui pourrait très bien disparaître demain?

Et puis le temps passe et bébé est toujours là. Elle évolue doucement mais sûrement. Et un beau jour, bébé est assez grand pour sortir de sa couveuse (environ 1kg750). On lui donne son premier bain dans une vraie baignoire, on l’habille avec des petits pyjamas taille 42 (la taille naissance c'est 50), on lui donne sa première tétée… Chaque jour passé, chaque petit évènement aussi minime soit-il est une victoire énorme.

Et d’un autre côté, il y a les moments de doute et de profond désespoir. On se dit qu’elle n’ira jamais mieux, qu’elle n’arrivera jamais à respirer sans cette machine, ni à manger sans sa sonde. Au début, les médecins nous préviennent. Ils nous disent que le parcours d’un préma est semé d’embuches et qu’il est en dents de scie. Qu’il y a des hauts et des bas. Et même si on y est préparé, les jours de bas, on s’effondre. On a l’impression d’avoir fait un pas en arrière. Elle qui allait si bien hier a de nouveau des problèmes pour respirer aujourd’hui. Qu’est-ce qui se passe ? On ne comprend pas toujours tout. Même si le personnel médical s’attache à vulgariser au maximum afin que l’on comprenne, ce n’est pas toujours le cas. On n’écoute pas toujours vraiment ce qu’ils nous disent. Ce qu’on veut savoir c’est est-ce qu’elle va bien ? Quand pourrons-nous l’emmener avec nous ?



Et enfin, vient la sortie de l’hôpital. Après un nombre incalculable de rebondissements, de bonnes et de mauvaises surprises, c’est le jour du départ. On fait le tour du service, on dit au revoir et à jamais, merci pour tout et on s’en va. On arrive à la maison… Et maintenant ? On se retrouve avec un bébé qui a déjà 2, 3 voir 4 mois mais qui ressemble à un nouveau-né. Donc on recommence tout. Les tétées toutes les deux heures, voir toutes les heures  (pour celles qui allaitent) suivant les jours, les couches, les bains, les nuits entrecoupées, etc. Sauf que là, on est seul. On ne peut plus appeler à l’aide.



On passe son temps à vérifier que le bébé respire, on a peur du moindre petit bruit. Bébé tousse ou éternue ? Au secours, vite aux urgences, il va mourir ! D’ailleurs en sortant les médecins nous ont bien dit de ne pas emmener bébé dans les espaces communs (centres commerciaux, bus, etc.) car il est fragile. Sauf que ça, l’entourage ne le comprend pas. « Non on ne sort pas avec bébé il fait trop froid. » « Oui mais moi avec mon bébé je sortais même en plein hiver ! » « Oui, mais notre bébé est prématuré. » « Mais c’est bon elle va bien maintenant… » Combien de fois j’ai entendu cette phrase… « Mais c’est bon maintenant elle va bien, il faut arrêter de la surprotéger… » Qu’est-ce que ça peut m’agacer d’entendre ça ! Oui aujourd’hui elle va bien ! Oui elle est tirée d’affaire ! Mais elle n’en reste pas moins un bébé qui n’a pas eu la possibilité de se développer normalement dans le ventre de sa mère et elle est fragilisée par ce départ difficile dans la vie. Elle a du se battre pour vivre et ce n’est pas rien. Et si nous nous inquiétons trop pour nos bébés prématurés laissez-nous le faire ! Nous en avons besoin. Nous avons besoin de combler ces quelques mois qui ne se sont pas passés comme prévu. Ça passera certainement quand la différence ne se verra plus. Mais pour l’instant il faut comprendre.

Oui aujourd’hui ma fille a un an. Sauf qu’elle ne devrait avoir que 9 mois et demi. Elle a donc un an mais ne marche pas, ne tient pas seule debout, ne va pas à 4 pattes, etc. Elle ressemble donc à un bébé de 9 mois. Parfois quand on me demande son âge je ne sais pas toujours quoi répondre… Si je dis qu'elle a un an j’aurai droit à « Et elle ne tient pas encore debout ? Elle est en retard… » Si je dis 9 mois et demi j’aurai menti… Donc j’explique mais les gens ne comprennent pas toujours. « Oui mais sur ses papiers elle a un an ? » « Oui. » « Donc elle a un an. » « Ok. » Que répondre de plus à ceux qui ne veulent pas (ou ne peuvent pas) comprendre...

Voilà. Je pense qu’il est important de partager son vécu aussi lourd et difficile soit-il si il peut aider l’entourage à comprendre et à mieux appréhender le ressenti des personnes concernées. Je sais que cet article est particulièrement long et j’en suis désolée.

Je terminerai par une citation qui m’a beaucoup plus et que je trouve très juste. Elle est de Penelope Leach : « Aimer un bébé est un cercle sans fin. Plus on l’aime, plus on reçoit, et plus on a envie de l’aimer. »


I.

3 commentaires:

  1. Ton article n'est pas long au contraire je suis resté sur ma faim de bcp d'infos,mais ton article est surtt chargé d'émotion j'en eu des larmes, tu as porté si lourd sans jamais te pleindre qu'elle courageuse tu fais, j'ai adoré ta citation elle m'a même ému je n'ai pas les mots exacte je veux juste te dire que tu es une maman parfaite et j'ai eu l'occasion de le constater que dieu te la garde et te la protège ❤❤❤

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    1. Coucou Amina. Merci beaucoup, ton commentaire me fait chaud au coeur. Tu aurais aimé savoir quelque chose en particulier? Si tu as des questions n'hésite pas. :-*

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  2. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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